Un itinéraire spirituel : des racines chrétiennes
Quand les soldats de la République ouvraient à coups de hache
les portes des églises.
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« Afin d’appliquer la loi organisant la séparation de l’église et de l’état –elle avait été votée le 9 décembre 1905- un ou deux fonctionnaires devaient pénétrer à l’intérieur des lieux de culte
pour y dresser l’inventaire des biens qui allaient tomber dans le domaine public.
Un avis fut donc envoyé au curé de Farret. Farret, c’était ma paroisse et ce village est encore aujourd’hui rattaché à la commune de Saint Juèry le Château. A l’heure annoncée, armés de fourches et de bâtons, tout ce que Farret comptait d’hommes valides avait pris position à l’extérieur de l’édifice.
Tandis que chapelet à la main, protégés par ce rempart humain, femmes et enfants restaient barricadés à l’intérieur. Galvanisés par la présence du Saint Sacrement et les diatribes de leur pasteur, les paroissiens insurgés avaient chanté et rechanté « Nous voulons Dieu, c’est notre gloire ! Nous voulons Dieu, c’est notre roi ! » Moyennant quoi, la première tentative de profanation échoua. L’ennemi et ses gendarmes battirent en retraite.
Le Te Deum entonné pour célébrer cette victoire fut exceptionnellement retentissant. A Saint Juèry, la résistance ne fut pas moins héroïque et victorieuse : « Si cet inventaire devait être le prélude à la spoliation (souligné dans le texte), nous sacrifierions nos vies », menaça le curé dans sa lettre au préfet. De martyrs, il n’y en eût point.
Mais, 9 mois plus tard, "l’athéisme" ayant à nouveau remporté les élections à Paris, il ne fallut pas moins de 50 soldats du 81ème de ligne de Rodez pour prendre à l’improviste le contrôle du sanctuaire, en forcer l’entrée et permettre au Receveur des impôts de recueillir les renseignements réglementaires. C’était le 27 Novembre 1906.
Devenue la vieille église, cet édifice servait dans mon enfance de salle paroissiale. Sur la porte étaient parfaitement visibles les entailles des coups de hache assénés par les profanateurs. Pieusement conservées, ces stigmates prouvaient et la barbarie des persécuteurs et la vaillance de leurs saintes victimes. Des copeaux tombés à terre, les plus ferventes avaient fait des reliques qu’elles honoraient chez elles.
Cette vieille église a été récemment restaurée. Si vous passez par Saint Juèry, entrez : la porte et ses blessures y sont exposées ». In « J'étais prêtre..." p.34 ss.